Les paroles de la chanson, interprétée vendredi dernier par Frédéric Fromet sur France Inter, habitué à brocarder l’actualité, ont provoqué un tollé chez certains auditeurs Franco-Turcs. Laurence Bloch, directrice de la radio réagit.
«Vendredi, tout est permis» avec Frédéric Fromet. Ce chansonnier a pour habitude de brocarder l’actualité sous forme de chansons satiriques. On se souvient surtout de la chanson Coulibaly Coulibalot après les attentats de Paris en 2015. Le vendredi 6 janvier, dans l’émission Si tu écoutes j’annule tout, présenté par Alex Vizorek et Charline Vanhoenacker, les paroles de sa nouvelle chansonnette A la Reina d’Istanbul ont divisé les avis des auditeurs Franco-Turcs. Selon certains, sur Facebook et Twitter, «cette chanson est un message pour dénoncer l’hypocrisie et les dérives de l’Occident face à l’attentat à Istanbul». Mais d’autres, pensent que, même si la chanson est à prendre au second degré, se disent «choqués par les rires des invités sur le plateau, et pensent que «la chanson constitue un manque de respect envers les familles des victimes […] et «ne souhaitent pas de l’humour noir sur le sujet du terrorisme qui les frappe au quotidien».
À la suite de nombreux courriers adressés à France Inter, la directrice de la radio vient d’adresser une lettre aux auditeurs: «Je prends connaissance de votre courriel et de vos protestations concernant la chanson écrite et interprétée par l’un des humoristes chansonniers de France Inter, chanson dont vous considérez qu’elle est irrespectueuse envers les victimes des attentats , leurs familles et la nation turque toute entière. Je suis vraiment désolée que ce soit cette interprétation au premier degré qui ait retenue votre attention et je comprends qu’elle vous choque mais les ressorts de l’humour en France et sur France Inter notamment sont en apparence de retenir les arguments les plus choquants , en l’occurrence la distance que nous aurions avec le peuple turc qui nous autoriserait l’indifférence , pour mieux dénoncer le scandale de ce raisonnement et de cette attitude et appeler les citoyens et dirigeants européens à manifester une solidarité et une compassion fraternelles à l’égard de toutes les victimes.[...]. Soyez sûr qu’il n’y a ni mépris , ni moquerie mais au contraire l’envie de réveiller les consciences, avec humour , distance et courage car il en faut pour résister à ce que le terrorisme cherche à faire taire».
Interrogée après la diffusion de son courrier, Laurence Bloch revient sur les faits et explique: «Si le peuple turc a été blessé, je suis sincèrement désolée, ce n’était absolument pas notre but. C’était un message alambiqué, de fraternité à l’égard des Turcs et je voudrais reprendre à mon compte, la solidarité des Français à l’égard des victimes et des familles, c’est extrêmement important et majeur pour moi, qu’il n’y ait pas la moindre confusion là-dessus. D’ailleurs dans mon message de vœux de la nouvelle année, j’avais souligné que ce monde avait besoin de fraternité, je tiens à redire aux Turcs notre profonde solidarité autour des attentats. Frédéric dans sa chanson, a voulu faire passer un message très important et très fort. C’est l’indifférence kilométrique ; il s’indigne de celà. Moins vous en êtes proches, moins ça vous touche…. Les Français ont été bouleversés par les attentats en Turquie. En France il y a eu les tueries de Nice, le Bataclan, donc ils sont très solidaires avec les Turcs […].
Depuis, la chanson est relayée dans les médias en Turquie. Et face aux proportions grandissantes de la polémique sur les réseaux sociaux, la directrice de France Inter a pris les devants. «J’ai appellé l’ambassade de France à Ankara mais aussi l’ambassade de Turquie à Paris en disant que j’étais à leur disposition pour expliquer que c’était une chanson satirique, à prendre au second degré. Evidemment j’arrive à comprendre les réactions des auditeurs Franco-Turcs la douleur est encore vive. C’est d’autant plus compréhensible quand on sort du contexte. Notre émission est dédiée au divertissement, à l’humour, l’ironie, la caricature, la parodie. Elle est faite pour ça, elle est repérée pour ça. Si on sort du contexte, bien sûr que ça prend d’autre proportion. Mais quand on se situe dans le contexte de l’émission, et qu’on prend le temps de relire ou d’écouter la chanson, on comprend bien le message fraternel de Frédéric».
Indignés par les réactions parfois virulentes à l’encontre de Frédéric Fromet, de nombreux auditeurs et internautes ont adressés leurs messages de soutien tels «N’arrêtes jamais de chanter s’il te plaît Frédéric» ou encore «les victimes du terrorisme méritent tous le même traitement de moral, la même indignation face au terrorisme et ce, quelque soit leur origine ethnique et c’est bien pour celà que nous vous remercions Frédéric!».