Le candidat PS a présenté son programme jeudi. Il mise tout sur une relance par la demande, mais sans donner les moyens pour financer ses promesses.
C’est le premier étage de la fusée censée faire redécoller la campagne de Benoît Hamon. Avant son grand meeting à Bercy, dimanche 19 mars, et le débat télévisé de la présidentielle programmé le lendemain, le candidat socialiste a présenté, jeudi 16 mars, son projet électoral.
Dans un premier temps, le député des Yvelines avait imaginé se prêter à cette figure imposée d’une présidentielle le plus tard possible avant le premier tour de l’élection, jugeant suffisant d’égrener ses propositions, thème par thème, au cours de meetings ciblés.
Mais les dernières semaines, qui l’ont vu peiner à se faire entendre dans la campagne, ont obligé M. Hamon à accélérer son calendrier et à se livrer à ce grand oral solennel, comme Emmanuel Macron et François Fillon avant lui.
Son projet d’une trentaine de pages, auquel Le Monde a eu accès, reprend plusieurs des thèmes développés par M. Hamon durant la primaire de janvier : revenu universel d’existence, taxation des robots, mise en place d’une transition écologique et instauration d’une nouvelle République.
Mais ce programme pour « un futur désirable et possible » fait également la synthèse d’idées défendues par ses concurrents de janvier, Arnaud Montebourg et Vincent Peillon, par les frondeurs du PS durant le quinquennat, et les écologistes et radicaux de gauche, ralliés depuis la victoire de M. Hamon.
Ce projet s’appuie principalement sur la relance par l’investissement et le pouvoir d’achat, et rompt largement avec la politique de l’offre et de lutte contre les déficits publics décidée par François Hollande depuis 2012.
« S’agissant des finances publiques, les politiques d’austérité ont échoué, est-il écrit dans le document. Il faut aujourd’hui inverser la logique : investir d’abord pour l’avenir, pour l’emploi, pour la compétitivité, dans la prévention des risques, de la santé, de la protection de l’environnement et des salariés. C’est le plus sûr moyen de réduire sérieusement et durablement les déficits et la dette », est-il écrit.
Le programme Hamon, qui prévoit de nombreuses dépenses, est accompagné d’un chiffrage budgétaire peu précis, qui ne détaille guère les moyens pour financer toutes ses promesses.
Pour l’élaborer, le candidat socialiste s’est simplement placé sous « l’hypothèse d’une croissance potentielle de 1,3 % du PIB », soulignant que « les déficits seraient en fin de période à l’étiage de ceux du budget prévisionnel de 2017, soit 2,7 % du PIB ».
« On est ambitieux, mais sérieux. On dépassera sans doute dans un premier temps les 3 % de déficit, mais on s’engage à rendre les finances publiques à la fin du quinquennat dans les clous des 3 % », assure le député des Hauts-de-Seine Jean-Marc Germain, codirecteur de la campagne.
Outre ses idées sur l’Europe récemment exposées et ses propositions économiques et fiscales, le candidat PS a prévu d’investir dans des secteurs qui parlent à l’électorat de gauche : l’éducation, l’écologie, les services publics, la culture, les territoires, etc.
Il propose par exemple l’inscription, dans la loi, d’une « garantie service public » qui installe un « panier de services publics à moins de trente minutes de chaque bassin de vie », afin de lutter contre la désertification publique dans les zones rurales ou périurbaines. Il promet également de « ne plus baisser » les dotations aux collectivités territoriales et de « revaloriser » le point d’indice des fonctionnaires, notamment ceux de catégorie C.
Du côté de l’éducation nationale, M. Hamon annonce le recrutement de « 40 000 enseignants en cinq ans » et de « 7 500 emplois dans les universités et les laboratoires » (en investissant « 1 milliard d’euros par an » dans la recherche), ainsi que la mise en place d’« un seuil maximum de vingt-cinq élèves par classe en CP-CE1-CE2 ». Il veut aussi créer « un service public de soutien scolaire » et « rebâtir » la carte scolaire pour « développer la mixité sociale ».
Au rayon écologie, il « interdit » les perturbateurs endocriniens, met en place une taxe carbone, supprime le diesel « à horizon 2025 », et demande qu’« au moins 50 % de repas bio » soient servis dans la restauration collective. D’ici à 2025, il veut « porter à 50 % » la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique, avec « un objectif de 100 % en 2050 », couplé à un arrêt du nucléaire sous vingt-cinq ans.
Sur le plan institutionnel, l’ancien frondeur maintient sa promesse d’un « 49.3 citoyen », la reconnaissance du vote blanc et du droit de vote aux étrangers non communautaires aux élections locales.
« Dès l’été 2017 », une « conférence pour une VIe République » sera convoquée pour établir une nouvelle Constitution. Afin de « prévenir les conflits d’intérêts », M. Hamon veut obliger tout candidat à une élection à « publier la liste de ses grands donateurs », une mesure qui fait écho à ses demandes répétées envers M. Macron de donner les noms des plus gros contributeurs financiers à sa campagne.
Par ailleurs, le député des Yvelines entend permettre l’accès à la procréation médicalement assistée (PMA) aux femmes seules et aux couples de femmes, et ouvrir le droit aux allocations familiales « dès le premier enfant ».
Il souhaite aussi augmenter de 10 % l’allocation adulte handicapé comme le minimum vieillesse, débloquer « un plan de renouvellement urbain » des banlieues de 10 milliards d’euros, et porter à 1 % du produit intérieur brut le budget de la culture et à 2 % celui de la défense. D’un côté, il s’engage à créer « 5 000 postes supplémentaires » dans la police et la gendarmerie, de l’autre à « légaliser » l’usage du cannabis et à « expérimenter » le récépissé de contrôle d’identité pour lutter contre les contrôles au faciès.