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Un ministre flamand vent debout contre l'Europe pour défendre la recette traditionnelle des frites belges

Le ministre flamand du Tourisme Ben Weyts s'est fendu d'une lettre à la Commission européenne pour défendre la traditionnelle double-cuisson des frites belges. L’institution bruxelloise estime que la célèbre recette favorise la présence d’une substance cancérigène qu’elle souhaiterait voir disparaître.
 
Au royaume des Belges, les frites sont reines ; gare donc à celui qui s’y attaquerait. Célèbre dans le monde entier pour ses bâtonnets de pommes de terre cuits deux fois dans deux huiles différentes, la Belgique doit-elle sentir son patrimoine menacé ? C’est en tout cas ce que semble estimer Ben Weyts, ministre flamand du Tourisme et membre du parti populiste Nieuw-Vlaamse Alliantie (N-VA), qui s’est fendu jeudi d'une lettre au vitriol à la Commission européenne pour défendre la traditionnelle recette.
 
"Nos frites doivent leur saveur au savoir-faire de nos frituristes", commence l’élu dans son texte adressé au commissaire européen chargé de la Sécurité alimentaire Vytenis Andriukaitis et resitué dans les colonnes du quotidien néerlandophone Het Nieuwsblad. "Je comprends que l’on puisse avoir, hors de notre pays, une autre culture, avec précuisons, blanchiment ou frites surgelées, mais il y va de notre tradition culinaire", poursuit-il. "C’est précisément grâce à cela que nous avons les meilleures frites au monde, et je n’ai pas l’intention d’y renoncer. Ce serait un crime que de l’interdire."
 
Selon l’institution bruxelloise, qui s’appuie sur plusieurs études scientifiques et planche sur la question depuis sept ans, la double-cuisson (entre-autres modes de préparation) provoquerait une importante concentration d’acrylamide. Cette substance qui se forme naturellement dans les aliments riches en amidon – ce qui est le cas de la "patate" – est considérée comme hautement cancérigène. Comme le précisent nos confrères de la Voix du Nord, l’Agence américaine de protection de l’environnement l’a déjà classée comme "extrêmement dangereuse". Si rien n’est encore sûr, la Commission pourrait être tentée d’imiter les Etats-Unis en adoptant une législation plus contraignante en la matière. Les friteries d’outre-Quiévrain, mais aussi celles des Hauts-de-France, pourraient alors par exemple se voir obligées de blanchir leurs frites avant de les cuire.
 
Une étape qui, si elle allait à l’encontre de la recette classique, permettrait de faire baisser drastiquement le niveau d’acrylamide du tubercule. Et contrairement au ministre nationaliste flamand, certains voient ce genre de mesure d’un bon œil. "Que Ben Weyts, tel un éléphant dans un magasin de porcelaine, empoisonne un débat avec un argument et met en danger la lutte contre le cancer de façon polémique, est inacceptable", estime ainsi l'eurodéputé belge écologiste Bart Staes. "Chaque semaine au Royaume-Uni, ce genre de demi-vérités et mensonges est développée dans les journaux du dimanche et les tabloïds. Et c'est ce type d'articles qui a conduit au vote pour le Brexit", déplore-t-il encore, qualifiant les propos de Ben Weyts de "bashing anti-Europe dans la plus pure tradition rabique eurosceptique".
 
Cette polémique naissante en rappelle une autre : celle, en 2013, des roulés danois à la cannelle – les kanelsnegle – jugés trop chargés en coumarine, une substance naturellement présente dans la forme chinoise de l’épice brune-orangée et considérée dangereuse pour le foie. "Nous préparons des pains et des gâteaux avec de la cannelle depuis deux cents ans (…) et si on utilise moins de cannelle, on change le goût pourtant distinctif de nos viennoiseries", regrettait à l’époque un responsable de l’association des pâtissiers du Danemark, craignant, fataliste, d’assister à "la fin de la brioche à la cannelle telle que nous la connaissons".
 
Récurrent à chaque tentative de l’Union européenne (UE) de se frotter aux coutumes et aux traditions de ses pays membres, ce mécontentement aurait, cette fois tout du moins, pu être évitée. En Suède, où des brioches similaires – les kanelbullar – sont confectionnées depuis des siècles, les autorités avaient trouvé la parade en les classant comme "plats traditionnels et saisonniers", contrairement à la version danoise, quant à elle catégorisée comme "produit de boulangerie de tous les jours". Preuve qu’une certaine souplesse peut exister même en Europe, les Suédois étaient, grâce à cette différence sémantique de taille, autorisés en toute légalité à utiliser trois fois plus de cannelle que la limite fixée. De quoi, peut-être, permettre aux frites belges de rester reines en leur royaume.
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