Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Les Infos Videos

Le meilleur des Infos et des videos du moment. Retrouvez toutes les news 24h/24 et 7j/7.

Mylène Demongeot raconte la "guerre" Marais-De Funès sur Fantomas

Mylène Demongeot raconte la "guerre" Marais-De Funès sur Fantomas
 
Jusqu’au 31 juillet, date de l’inauguration du musée De-Funès à Saint-Raphaël, Var-Matin publie une série d’entretiens avec ceux qui ont côtoyé la star. Ce jeudi : rencontre avec la “Nicole” de "Fantomas".
 
"Tous les autres acteurs de Fantomas sont morts ; il ne reste que moi. Je suis une survivante…" Mylène Demongeot éclate de rire. Pas question de mettre du pathos ou de se lamenter sur le temps qui file : elle évoque le passé sans nostalgie… et sans langue de bois. En sirotant un jus d’orange, dans ce 10e arrondissement de Paris où elle a élu domicile après 27 années sur l’île de Porquerolles, elle se replonge dans ses tumultueuses années soixante.
 
Avant Fantomas, en 1964, vous aviez déjà eu l’occasion de tourner avec Louis de Funès ?
 
Oui. En 1955, nous avons partagé l’affiche de Frou Frou. Enfin, partagé… c’est beaucoup dire. Nous n’avions que des rôles secondaires. Mais lui m’avait remarquée ! [Elle sourit] J’étais très jolie à l’époque.
 
Louis vous faisait rire ?
 
Énormément ! La première fois que je l’ai vu à l’écran, c’était en 1954 dans la comédie des Branquignols – Ah ! les belles bacchantes. Puis il y a eu cette scène géniale, avec Bourvil et Gabin, dans La Traversée de Paris. Mais le top du top, c’était au théâtre dans La Grosse valse en 1961. Il était extraordinaire ! J’y suis retournée trois fois.
 
Et donc, le premier jour, sur le plateau de Fantomas…
 
Je lui ai sauté au cou ! [Elle éclate de rire] Son épouse Jeanne, qui était toujours dans son sillage, n’a pas vraiment apprécié… J’ai accepté ce film parce qu’il y avait Louis.
 
Et Jean Marais ?
 
C’est différent. À 12 ans, après avoir vu L’Eternel retour, je suis tombée folle amoureuse de lui. J’avais appris qu’il avait une péniche à Neuilly. J’ai réussi à savoir où elle se trouvait et j’ai campé devant l’embarcation pendant plusieurs jours. Il n’est jamais venu. [Elle sourit] À l’époque, le public ignorait qu’il était homosexuel. Je me souviens d’un titre de journal : « Jean Marais passe ses vacances dans un village de tentes ». Je n’avais pas compris le double sens…
 
Vous avez écrit que le climat entre Marais et De Funès, pendant le tournage, était à l’orage…
 
L’ambiance était tendue dès le premier "Fantomas". Elle s’est dégradée au cours du deuxième et elle est devenue franchement exécrable sur le dernier. Le fond du problème, c’est que Louis était sur une phase ascendante, alors que la carrière de Marais déclinait. Sur le premier opus, leurs rôles étaient équilibrés. Mais à l’écran, Fufu a tout ramassé ! Ce n’étaient plus les aventures de Fantomas, c’étaient celles du commissaire Juve…
 
"Fantomas se déchaîne" est davantage centré sur De Funès ?
 
Bien sûr. Entre le premier et le deuxième film, Le Gendarme de Saint-Tropez a propulsé Louis au sommet du box-office. Puis Le Corniaud est sorti pendant que nous tournions le deuxième épisode. Avec le succès immense que l’on connaît…
 
Dans "Fantomas contre Scotland Yard", Marais n’est plus qu’un comparse parmi d’autres…
 
C’est aussi le cas de mon personnage, Nicole. [Elle sourit] Le film est construit pour mettre en valeur la puissance comique de Louis. C’est pour cela qu’il est aussi bon !
 
Marais conserve tout de même des scènes spectaculaires avec de belles cascades ?
 
Comme toujours, il refusait de se faire doubler. Mais il avait dépassé la cinquantaine et ça devenait difficile pour lui. Les cascadeurs, qui avaient été embauchés, râlaient : ils auraient pu exécuter en dix minutes ce que Jeannot faisait en une demi-journée.
 
De Funès n’était pas responsable de cela…
 
C’est un ensemble de paramètres. Les deux n’avaient aucun atome crochu. Ils venaient de mondes différents. Jeannot, c’est Cocteau, les poètes ; des gens raffinés, élégants et un peu snobs. Sur le plateau d’une farce comme Fantomas, il n’était pas dans son élément. Louis, de son côté, était un homme réservé. Pas le genre à toquer à la loge de son partenaire pour aplanir les difficultés. [Elle réfléchit] Il y avait aussi un hiatus dans leur méthode de travail. Jean était bon dès la première prise ; ensuite, son naturel se délitait. Louis, au contraire, avait besoin d’un certain temps pour se « chauffer ». Jeannot avait le sentiment que le réalisateur choisissait les meilleures scènes de Louis, plutôt que les siennes.
 
Sur le plateau, cette ambiance se traduisait comment ?
 
Il y avait d’un côté l’équipe de Fufu, de l’autre celle de Marais.
 
Dans quel camp étiez-vous ?
 
Celui de Louis, naturellement ! On rigolait bien avec lui. Et puis, je l’admirais sincèrement. Si vous lisez le scénario, et que vous voyez ce qu’il en a fait, c’est tout simplement extraordinaire !
 
Le piquant de l’affaire, c’est que vous aviez énormément de scènes avec Marais qui incarnait votre fiancé.
 
Cela a posé des problèmes ?
 
Pas vraiment. Jeannot était un homme agréable et courtois. Sauf une fois… Pour une scène, nous devions marcher côte à côte, face caméra. J’ai pris un peu de retard, ce qui l’a obligé à tourner légèrement la tête pour me parler. Il a piqué une crise ! Une vraie ! Il m’a traitée de salope. [Elle éclate de rire]
 
Après le dernier "Fantomas", vous avez eu l’occasion de le revoir ?
 
Oui, bien plus tard, pour son 82e anniversaire. Il était toujours beau comme un Dieu !
 
Et De Funès ? Vous n’avez plus tourné avec lui…
 
[Elle soupire] Son épouse était d’une jalousie maladive. Sur Fantomas se déchaîne, Louis et moi avons pris ensemble un télésiège pour rejoindre le lieu de tournage ; Jeanne suivait derrière. À l’arrivée, elle lui a fait une scène… On aurait dit un gamin pris en faute ! Alors, forcément, je n’étais pas dans les petits papiers de Jeanne. [Silence] Elle n’a pas toujours été de bon conseil pour Louis.
 
Que lui reprochez-vous ?
 
En 1966, j’ai appris que Marcel Aymé adorait De Funès et qu’il rêvait d’écrire pour lui. Je l’ai dit à Louis : « Tu te rends compte, Fernandel a eu Pagnol. Toi, tu auras Aymé ! » Fufu est devenu blême : « Je n’oserais jamais le rencontrer ! Je ne saurais pas quoi lui dire. À côté de lui, je ne suis rien. » Et il n’y est jamais allé ! Si Jeanne l’avait encouragé, il serait parvenu à surmonter sa timidité maladive. Mais Marcel Aymé, ce n’est pas Jean Girault [réalisateur des “Gendarme”, N.D.L.R.] ; cela impliquait une certaine prise de risque… Vous imaginez, si le virtuose qu’était Louis avait eu une telle partition à jouer ? Je suis inconsolable des chefs-d’œuvre qu’ils n’ont pas faits ensemble.
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article