L’organisateur du salon Paris Manga, qui devait se tenir les 7 et 8 mars porte de Versailles, avoue ses craintes sur l’avenir de la manifestation. Et dénonce des mesures gouvernementales «excessives».
« Clairement, on est dans la merde… » Entre tristesse et colère, Laurent Tanguy, fondateur et organisateur du salon « Paris Manga Sci-Fi Show », ne mâche pas ses mots. Dimanche, la mort dans l'âme, il a été obligé d'annoncer l'annulation de la 29e édition de la manifestation qui devait se dérouler les 7 et 8 mars à Paris Expo, Porte de Versailles. Deuxième plus grand salon de BD japonaise en France mais aussi rendez-vous des fans de séries TV, il attire près de 72 000 visiteurs à chacune de ses deux éditions annuelles.
La décision fait suite à l'interdiction par le gouvernement des rassemblements de plus de 5 000 personnes en milieu confiné. « Je l'ai appris chez moi, samedi, devant ma télé, confie Laurent Tanguy. J'ai essayé de joindre la préfecture, les propriétaires des locaux Porte de Versailles… Pas de réponse. Aussitôt, nous avons constitué une cellule de crise pour essayer de limiter au maximum les dégâts ».
Mais financièrement, le coût estimé est déjà énorme. « Je dirais 300 000 euros de perte sèche. Il y a là-dedans toute la communication, les cachets des acteurs qui font le déplacement, les frais d'avions, d'hôtels pour les invités… Sur un chiffre d'affaires de 1,5 million annuel, c'est terrible. »
Depuis, ce passionné passe son temps au téléphone pour essayer de trouver des solutions. « J'ai tous nos partenaires en ligne. Je dois les remercier car ils nous soutiennent et sont prêts à faire des efforts. Certains acteurs m'ont même déjà proposé de nous rembourser leurs cachets… Il y a vrai élan de solidarité. Bien sûr, nous rembourserons tous les visiteurs qui ont déjà pris leurs billets, qu'ils ne s'inquiètent pas. En revanche, il faudrait que les exposants fassent des efforts et acceptent de reporter sur une prochaine édition… sinon, je n'aurai pas assez de trésorerie ».
Et les assurances ? « Nous n'en avons pas pour ce genre d'annulation. J'avais fait faire des devis pour les circonstances exceptionnelles il y a quelques années : ils étaient tous à six zéros… Franchement, je ne sais pas si on s'en remettra. Les prochaines éditions sont clairement menacées même si on ne baisse pas les bras », lâche, la gorge nouée, Laurent Tanguy.
Une émotion à laquelle succède un peu de colère. « On peut comprendre que l'Etat prenne des mesures. Mais celle-là est excessive et ne prend pas du tout en compte les retombées économiques possibles, estime l'organisateur. J'ai eu les gens des entreprises de billetteries au téléphone : ils disent que bientôt, ils n'auront plus rien à vendre et qu'ils seront au chômage technique… Et puis ça veut dire quoi d'interdire les rassemblements de plus de 5 000 personnes en intérieur et de ne pas interdire les matchs de foot ou le métro ? J'ai franchement le sentiment que le gouvernement cherche davantage à se protéger dans cette histoire qu'à protéger les citoyens. »