Des plages fermées, des pistes cyclables interdites à la circulation : l'île de Ré, en Charente-Maritime, a pris hier des décisions drastiques pour assurer le confinement de sa population. « Il fait beau, les gens se croient en vacances », résume Souhir, une Rétaise de 33 ans installée à Saint-Clément-des-Baleines. L'arrivée en nombre de propriétaires de résidences secondaires ces derniers jours a mis le feu aux poudres et agacé plus d'un insulaire.
« C'est le grand n'importe quoi. Lundi, j'ai vu une famille entière pique-niquer sur la plage, d'autres faire du paddle. On ne reproche pas à ces gens de venir, c'est leur état d'esprit qui nous inquiète. L'essentiel de la population est retraitée. On craint pour nos personnes âgées qui pourraient attraper le virus », s'énerve Marie, 54 ans, à Ars-en-Ré. Face à ces comportements inadaptés, les dix communes de l'île de Ré ont ainsi décidé de sévir.
« Toutes ces personnes n'ont pas entamé immédiatement leur confinement, il y a eu une incompréhension. Certains ont pris leurs vélos, d'autres sont allés à la plage. Pour la population locale, ça a été une surprise. Nous avons dû gérer beaucoup de tensions, il fallait y mettre un coup d'arrêt. Les gens ne vont sûrement pas se mettre aux sports nautiques durant le confinement », assure Lionel Quillet, le maire de Loix et président de la communauté de Communes de l'île de Ré.
L'élu a lui aussi signé un arrêté interdisant d'emprunter les pistes cyclables en direction des villages voisins. « Nous considérons qu'il s'agit de balades », tranche Lionel Quillet. La commune d'Ars-en-Ré a, elle, été l'une des premières à interdire l'accès à ses plages. « Jusqu'à nouvel ordre », précisent les arrêtés fixés sur des barrières placées au pied des dunes. « Nous cherchons à éviter les regroupements de personnes qui n'ont pas à être là. Le confinement, ça signifie rester chez soi, insiste le maire d'Ars, Jean-Louis Olivier. Vous pouvez vous balader près des plages si vous habitez à côté. Si vous résidez à plusieurs kilomètres, vous n'avez rien à y faire ! »
Lundi, plus de 1000 véhicules supplémentaires ont franchi le pont de l'île de Ré par rapport à une journée ordinaire. Les forces de l'ordre ont dû intervenir pour réguler la circulation. « En réalité, ça a commencé dès samedi, précise Marie. Puis les magasins ont été pris d'assaut. J'ai vu une personne payer 250 € de courses, elle venait pour la troisième fois ! » Lionel Quillet se veut rassurant : « L'île accueille en été plus de 300 000 personnes. Cet afflux de population lié au coronavirus est raisonnable. »
Ce mercredi, l'Agence régionale de santé (ARS) a pourtant validé la réouverture de l'hôpital d'été à Saint-Martin-de-Ré, une structure habituellement activée en période estivale pour absorber l'augmentation de la population et des besoins médicaux. Selon Lionel Quillet, cette décision aurait été prise pour « offrir une réponse médicalisée plus adaptée aux médecins généralistes et empêcher que les gens ne se rendent à La Rochelle ». Marie, la Rétaise croisée à Ars redoute de son côté les prochains jours : « L'île de Ré est un vase clos. C'était un petit paradis, ça pourrait devenir un cauchemar… »