La célèbre école militaire Saint-Cyr propose des stages, afin de transposer le savoir-faire et les valeurs militaires au monde civil et plus précisément à celui de l'entreprise. Depuis sept ans, 10.000 personnes ont participé à ces formations de leadership et de travail en équipe.
Au moment de quitter le camp boisé de Saint-Cyr Coëtquidan (56), il y a quelques jours, beaucoup ont la gorge nouée. Eux ne sont pas des élèves officiers à l'issue de leur formation mais 14 cadres du privé qui, en trois jours, ont, eux aussi, appris à commander. Depuis quelques années, les formations Leadership et Management fleurissent un peu partout en France. Il y a sept ans, la prestigieuse école militaire de Saint-Cyr s'est, elle aussi, engouffrée dans la brèche.
L'idée était de « partager avec le monde de l'entreprise un réseau, une histoire, une réputation », témoigne Cyril Barth, le directeur général de Saint-Cyr formation continue (Scyfco).
Sept ans plus tard, Scyfco enregistre une croissance annuelle de 35 %. À ce jour, elle a formé 10.000 participants provenant d'une centaine d'entreprises.
Saint-Cyr s'enorgueillit d'être le premier centre à avoir osé transposer le savoir-faire militaire aux civils. « Le caractère différenciant » par rapport aux formations de ce type dispensées ailleurs dans le privé, « ce sont 200 ans d'histoire du commandement », se targue Cyril Barth. « Les entreprises nous reconnaissent une capacité à les transporter beaucoup plus loin qu'elles n'imaginaient « et « à faire adhérer les gens à un projet qui les dépassent », explique-t-il. Comme à l'armée, ils apprennent « la nécessité de dépasser les stratégies individuelles pour développer une stratégie collective ». « On me l'avait raconté mais, là, je l'ai vécu : la puissance d'un groupe, c'est exceptionnel », témoigne ainsi Hervé, l'un des 14 cadres de Banque Populaire Atlantique (BPA) participant au stage. Pour ces cadres bancaires, ces trois jours de stage ont des airs de rite initiatique. Ils sont la troisième promotion de cette banque à étrenner cette formation.
Vêtus de combinaisons kaki déclassées et de casques blancs d'escalade, ils sont d'abord passés par la « piste d'audace » - tunnel, « asperge » (saut dans le vide le long d'un poteau), radeau - pour forger un esprit de groupe.
C'est seulement ensuite que Bruno, leur instructeur, leur a fait découvrir, à travers une série d'exercices en pleine nature, la nécessité du leader, ce chef d'orchestre dont le rôle n'est pas de « jouer le caporal de service » mais plutôt de « susciter la confiance et [...]de révéler les trésors cachés » de ses collaborateurs. La consigne est claire et invariablement répétée : « Il n'y a pas de leadership sans esprit d'équipe ». Après avoir construit un pont en bois en un temps record - se surprenant eux-mêmes -, brancardé une collègue prétendument mordue par un serpent et l'avoir transportée le long de la périlleuse « piste Gabon », avec de l'eau jusqu'aux cuisses, les stagiaires semblent avoir retenu la leçon. C'est Cyril, responsable d'une agence BPA, à Nantes, qui a joué le leader sur cet exercice. « J'ai appris que, quelles que soient les circonstances, il fallait savoir conserver sa prise de hauteur. Avec du recul, je dois vous dire que c'était impressionnant de vous voir bosser ainsi », finit-il par avouer à son équipe, la larme à l'oeil.