Vingt ans après avoir été accusé de tricherie, Olivier Chiabodo, ex-animateur de l'émission culte, révèle qu'il ne faisait qu'obéir à son producteur. Récemment licencié par TF 1, il a déposé plainte pour « harcèlement moral ».
C'est un véritable flash-back audiovisuel. Une tricherie qui a marqué tous les enfants de la télévision, et qui refait surface vingt ans après avec une plainte sulfureuse. La procédure a pour décors « Intervilles », l'émission mythique de divertissement de TF 1, célèbre pour ses vachettes lâchées dans l'arène sur les participants défendant les couleurs de leur ville. Une émission kermesse qui réunit à l'époque 7 millions de téléspectateurs...
Jusqu'au jour où son animateur vedette, Olivier Chiabodo, se retrouve pris dans un scandale. En 1997, « le Canard enchaîné » l'accuse d'avoir favorisé l'équipe du Puy du Fou (Vendée) en faisant des signes avec ses doigts pour indiquer les bonnes réponses à un quiz. Trois doigts déployés le long du jean qui provoquent une tempête médiatique et envoient au purgatoire l'animateur alors âgé de 33 ans. TF 1 décide de le licencier pour faute grave et dépose plainte contre X.
Olivier Chiabodo a toujours nié cette tricherie. Aujourd'hui âgé de 54 ans, il vient de porter plainte contre X pour « harcèlement moral » auprès du procureur de Nanterre (Hauts-de-Seine). Certains faits dénoncés sont sans doute prescrits, d'autres pas. Dans la procédure, l'ex-salarié cite TF 1 et son ancien producteur, Gérard Louvin.
Pourquoi vingt ans après ? C'est qu'entre TF 1 et l'ex-animateur l'affaire ne s'est pas arrêtée en 1997 mais beaucoup plus tard... en 2017. Entre-temps, Olivier Chiabodo a été licencié puis réembauché en 2006 avant d'être à nouveau licencié en janvier dernier. Une longue histoire à rebondissements multiples. En 1998, la plainte du géant de l'audiovisuel contre l'animateur est classée au pénal et son licenciement pour faute grave annulé au conseil de prud'hommes. TF 1 signe alors avec Chiabodo un accord de confidentialité. Les deux parties s'engagent à ne jamais évoquer le contentieux. Et surtout, pour l'animateur, à ne pas révéler l'ensemble des faits auxquels il aurait assisté au cours des tournages de l'émission.
L'ex-figure d'« Intervilles » devient réalisateur de documentaires pour la 5 mais, en 2006, TF 1 refait curieusement appel à lui. D'abord pour un CDD comme agent artistique puis, un an plus tard, pour un CDI comme directeur adjoint. La situation va très vite se dégrader. En 2008, le salarié est progressivement évincé de TF 1, et fait l'objet d'un détachement dans un fonds de dotation. Un placard doré mais pas de tout repos, selon l'intéressé, qui va finalement être remercié plus de huit ans plus tard.
Aujourd'hui, Olivier Chiabodo accuse TF 1 d'avoir acheté son silence, et livre ses secrets présumés. D'abord la tricherie serait le fait de son producteur, Gérard Louvin. L'ex-salarié, qui portait, selon lui, une oreillette sur les tournages d'« Intervilles », n'aurait fait qu'exécuter les ordres donnés par son ex-patron, qui aurait ainsi pris, seul, la décision d'éliminer certains candidats ou de complexifier les épreuves. Est-ce pour cette raison que Gérard Louvin avait lui aussi signé le fameux contrat de confidentialité à l'époque ?
Plus embarrassant, Olivier Chiabodo fait état de menaces, notamment de mort, proférées par son ex-producteur, en 2010, dans les locaux de TF 1. A ce titre, il produit plusieurs mains courantes. Surtout, l'ancien animateur affirme avoir assisté à des « choses plus graves qui nécessitent des investigations sérieuses », dixit son avocat, Me Yassine Maharsi. Des accusations jugées « ridicules » par Gérard Louvin, qui nous déclare « ne pas savoir de quoi on parle ». Par ailleurs, Olivier Chiabodo reproche à TF 1 son « mutisme » sur le sujet, voire son « cautionnement ».
« Mon client a longtemps gardé le silence, par contrainte, constate Me Maharsi. Pendant des années, TF 1 oscillait entre diverses pressions morales et multiples promesses professionnelles, créant un climat de tension insupportable. Après avoir rencontré l'opprobre, puis l'isolement, Olivier Chiabodo souhaite aujourd'hui rencontrer la justice et, ainsi, révéler ce qu'il sait. » Contacté, TF 1 n'a pas souhaité faire de commentaire, disant « ignorer tout de cette plainte et étant dans une procédure de contentieux avec l'intéressé ».
Olivier Chiabodo a été licencié en janvier par lettre recommandée. L'affaire est à nouveau devant les prud'hommes. TF 1 reproche à son salarié d'avoir, parallèlement à son détachement de la société, développé des activités de réalisation et de production pour son compte.