Eau noire, lancé par Claude François en 1976, vient de renaître. Les propriétaires de l'ancienne demeure du chanteur, à Dannemois, ont recréé cette fragrance pour les 40 ans de sa mort.
Cette année-là, Claude François créait sa propre fragrance. C'était en 1976. Parfumez-vous comme Cloclo... A l'occasion des 40 ans de la mort du chanteur, le 11 mars, ce parfum Eau noire a été recréé pour fêter cet anniversaire. Le laboratoire Mane a mené un travail d'archéologue sur les effluves, à la demande de la famille Lescure, propriétaire du moulin de Dannemois (Essonne), la demeure de Cloclo qu'ils ont rachetée en 1998 et transformée en musée.
Mais plutôt que de vendre des flacons d'eau de toilette, les fans pourront se procurer... des bougies. C'est que la fragrance de luxe nécessiterait d'être produite à grande échelle pour être distribuée à un prix raisonnable. « Le parfum coûterait 140 euros au minimum, c'est pour ça qu'on a choisi de le décliner en bougie, indique Julien Lescure. On en a fait 500, pour la date anniversaire. Ce sera collector. »
Si le parfum originel avait disparu, au gré des ventes aux enchères, la famille qui gère le manoir met la main sur plusieurs flacons intacts. Et l'idée leur vient de faire renaître Eau noire.
« Le défi, c'était d'obtenir la senteur exacte, sinon ce n'était pas la peine », lance Julien Lescure. Il confie plusieurs échantillons à l'entreprise française Mane, qui a pu isoler tous les composants. « Certains sont introuvables aujourd'hui, d'autres sont interdits parce qu'ils peuvent déclencher des allergies, décrypte François Damide, gérant de la société Crafting Beauty, spécialisée dans la parfumerie de luxe. Comme pour le parfum Chanel N o 5, qui a dû s'adapter aux nouvelles normes, il a fallu retrouver les notes exactes, mais de manière synthétique. Le challenge est réussi puisque la formule est fidèle à 99,9 %. »
Et les fans, prévenus par courriels, ont sauté sur l'occasion. En quelques heures, les 250 bougies Eau noire disponibles en prévente à 45 euros l'unité ont été écoulées. « Les gens en achètent deux : une pour la brûler et sentir à nouveau l'odeur, l'autre pour la garder précieusement », sourit Julien Lescure, qui a reproduit l'emballage d'origine à l'identique.
C'est rien par rapport aux 50 000 exemplaires que Claude François avait fait produire dans les années 1970, « quand un Saint Laurent ou un Dior commercialisaient 20 000 flacons en moyenne pour le marché français », commente François Damide, spécialiste des produits de beauté de luxe.
Artiste, mais aussi businessman, c'est Claude François lui-même qui avait eu l'idée de lancer son propre parfum, le premier créé par une star. Il avait fait venir un nez de Suisse dans son moulin de Dannemois pour travailler sa création. Cloclo souhaite alors que les effluves d'Eau noire lui rappellent son enfance en Egypte.
En tout, plus de vingt-cinq ingrédients (contre une quinzaine en moyenne pour un parfum lancé actuellement) composaient cette fragrance mythique. « Les gens voulaient tellement pouvoir sentir leur idole, là, ils pouvaient », décrypte Julien Lescure. « C'est un parfum haut de gamme, avec exclusivement des composants naturels, du patchouli, des accords verts de fougère, de la rose, du géranium et du musc », détaille François Damide.
« Claude François tente un coup et contre l'avis des spécialistes qui lui disaient qu'il allait dévaloriser son parfum, Eau noire est distribué jusque dans les bureaux de tabac, explique Julien Lescure. Il voulait que son public, issu des classes populaires, puisse y accéder sans aller dans une parfumerie. »
À l'origine, l'interprète de « Comme d'habitude » pense tenir un parfum mixte. « Je crois qu'il voulait surtout en vendre beaucoup auprès de ses fans féminines », commente François Damide. Mais rapidement, les utilisateurs ont trouvé que cette fragrance était faite pour les hommes. « Claude François avait déposé juste avant sa mort le nom Eau blonde qui devait être la version pour femme, souligne Julien Lescure. Mais il n'a pas eu le temps de travailler dessus. »