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Biodiversité : Le cri des experts face au silence des oiseaux

“Le printemps 2018 s’annonce silencieux dans les campagnes françaises”, s’alarment l’ornithologue Grégoire Loïs et ses collègues chercheurs. Le déclin des espèces y est sans précédent. En 2016, “Télérama” avait relaté cette situation inquiétante ; un an et demi plus tard, les nouvelles ne sont pas bonnes.
 
Mais où sont passées les alouettes ? » interrogeait Télérama en août 2016. De l’aube au coucher du soleil, aux abords de la forêt de Rambouillet, Ile-de-France, nous avions battu la campagne en compagnie de Grégoire Loïs. L’ornithologue du Muséum national d’histoire naturelle avait eu beau scruter les champs de colza environnants, quasiment aucun piaf n’avait voltigé à l’horizon. L’angoisse. « Je pensais voir au moins une ou deux alouettes des champs », se lamentait-il alors.
 
Un an et demi plus tard, les nouvelles ne sont pas bonnes du tout. A tel point que, ce mardi 20 mars, des chercheurs du Muséum et du CNRS ont tenu à publier un communiqué commun. « Le printemps 2018 s’annonce silencieux dans les campagnes françaises », titre-t-il. Leurs recensements respectifs aboutissent au même constat : le déclin des oiseaux est vertigineux. En moyenne, leurs populations dans les campagnes se sont réduites d’un tiers en quinze ans seulement. Et ces deux dernières années, l’hécatombe s’est encore accélérée…
 
« 33 % d’oiseaux en moins dans les zones agricoles, bon sang, nous ne nous attendions pas à des pourcentages pareils, commente aujourd’hui Grégoire Loïs. Comprenez bien : il ne s’agit pas seulement des zones où se pratique une agriculture particulièrement intensive. C’est une moyenne sur l’ensemble du territoire, aussi bien dans les grandes étendues beauceronnes que dans les zones bocagères de l’Ouest. Et cela touche les espèces dites “spécialistes”, c’est-à-dire adaptées à l’habitat agricole, comme les “généralistes”, que l’on est censé trouver un peu partout. Voilà qui présage de nombreuses extinctions régionales. Je ne donne guère plus d’une décennie au cochevis huppé ou à la – mal nommée – tourterelle des bois avant leur effacement totale d’Ile-de-France. »
 
A qui la faute ? « Cette disparition massive est concomitante à l’intensification des pratiques agricoles de ces vingt-cinq dernières années », avance prudemment le communiqué commun. Elle correspond « à la fin des jachères imposées par la politique agricole commune, à la reprise du suramendement au nitrate permettant d’avoir du blé surprotéiné et bien entendu à la généralisation des néonicotinoïdes, des insecticides neurotoxiques très persistants ». Vu le désastre, on se demande si la prudence affichée est bien appropriée.
 
Le défi à relever est d’autant plus grand qu’à en croire Grégoire Loïs « le tissu agricole est si imbriqué que des pratiques vertueuses ici ou là n’y changeront pas grand-chose. Il faut un bouleversement radical et profond. C’est comme un dégât des eaux : rien ne sert d’éponger uniquement la cuisine si le salon est inondé, l’eau passe d’une pièce à l’autre ».
 
Lors de notre virée aux abords de la forêt de Rambouillet, en 2016, l’ornithologue gardait tout de même le sourire. « Nous assistons sans doute à un effondrement de la biodiversité brutal et rapide. C’est dramatique, mais tout n’est pas irréversible. Les exemples abondent de faune qui se reconstitue dès lors que nous laissons souffler le monde sauvage. » Aujourd’hui, malgré ce nouveau coup de massue, il persiste et signe. « Au milieu des années 1960, la France n’abritait que trois cents couples de hérons cendrés. On compte aujourd’hui entre cent mille et deux cent mille individus. Lorsqu’on relâche la pression sur une espèce, elle reprend du poil de la bête. » Encore faut-il agir. Est-il nécessaire de préciser qu’il n’est plus temps de tergiverser ?
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